Dans le stationnement souterrain, au cinquième sous-sol, les pleurs, les cris, les plaintes, les rires et les soupirs s’entremêlent depuis trop longtemps. Entassés les uns contre les autres, les résidents de ce coin de Beyrouth ne veulent même plus se rappeler le passé, celui où ils couraient se cacher dans les sous-sols à la moindre alerte, celui des troupes israéliennes qui entraient dans le quartier pour menacer les hommes qui refusaient de parler ou qui riaient des femmes ou des vieillards. Cette époque leur paraissait désormais si lointaine en regard de ce statu quo d’épouvante qui les garde là, figés dans le temps, coupés du reste du monde. Quelques-uns sortent, qui la nuit, qui le jour, pour essayer d’acheter quelque nourriture ou remplir les bidons d’eau. Régulièrement, la génératrice de l’édifice montre des signes d’essoufflement et s’arrête parfois, sous les sifflements des gens de plus en plus frustrés.